Dispositif d’aide à destination des lieux qui ne sont pas des lieux de diffusion traditionnels, « Tous en live » est reconduit pour la troisième année consécutive. L’occasion de faire le point sur cette aide de la Sacem qui vise à encourager l’organisation de concerts.
« Les années 2020 à 2022 ont été particulièrement difficiles » témoigne Antoine Braud, patron de Petite Lune, une entreprise de l’économie sociale et solidaire qui gère plusieurs tiers-lieux, dont La Javelle à Paris, une guinguette installée dans le 12è au sein du tiers-lieu solidaire Bercy Beaucoup. « Ces difficultés perdurent encore aujourd’hui. Avec l’inflation, toute une partie de la population ne vient plus. Le budget loisir est évidemment le premier impacté. Cela se ressent sur le panier moyen qui s’est réduit de 10 à 15 %. Nous avons dû fermer certains de nos lieux et il devient moins aisé de maintenir une offre culturelle » poursuit-il.
Le secteur de l’hôtellerie-restauration, ainsi que les boîtes de nuit, fermées plus de 18 mois entre 2020 et 2022 ont été particulièrement touchés par la crise sanitaire. Pour répondre à ce type de situations, la Sacem a mis en place « Tous en live » en 2021, une aide dédiée aux établissements qui ne sont pas usuellement considérés comme des lieux classiques de diffusion de musique live.
ACCOMPAGNER LA REPRISE
« Avant « Tous en live », il n’existait pas de dispositif pour les établissements qui organisaient des concerts, mais dont ce n’était pas l’activité principale. Nous avons voulu répondre à ce vide pour ces lieux qui contribuent aussi, à travers le versement des droits d’auteurs, à soutenir la création. » explique Alice Falk, Responsable Action Culturelle au sein de la Direction du Réseau de la Sacem. « Il s’agissait à la fois d’encourager la reprise du live, pour redonner de la visibilité aux artistes après des mois d’interruption et de soutenir nos clients pour surmonter cette crise exceptionnelle : contribuer à faire revenir les clients dans ces établissements et permettre à nos membres de trouver de nouveaux lieux où se produire » poursuit-elle. Les difficultés liées au Covid se sont étirées, portées par un contexte international qui favorise l’inflation. Au départ conçu comme une aide exceptionnelle, « Tous en live » a finalement été reconduit en 2022, puis en 2023.
Dès la première année, plus de 600 concerts ont été organisés dans ce cadre puis plus de 1 000 en 2022. Le dispositif se décline en deux volets. L’un, dédié aux cafés, hôtels, restaurants, campings et bars d’ambiance, prévoit une aide de 250 € par concert organisé – un peu moins de deux cachets GUSO – dans la limite de trois événements par établissement et par an. Le second est destiné aux discothèques et clubs électro. Il prévoit une aide de 2 000 € par établissement pour l’organisation de 5 concerts dans l’année au minimum, et 5 000 € pour l’organisation de 10 concerts au moins par an. Le budget voté en 2023 prévoit 250 000 € pour le secteur de l’hôtellerie-restauration, soit 1 000 concerts, et 150 000 € d’aides pour les discothèques.
Pour bénéficier de « Tous en live », il suffit d’en faire la demande en ligne. « La demande est facile à faire, il n’y a pas de lourdeurs administratives, c’est simple et assez intuitif, le paiement se fait en heure… Honnêtement, je le recommanderais à tous les petits établissements comme le nôtre », témoigne David Hardouin, gérant du Garage, un café-concert à Angers. « Les établissements aidés dans ce cadre ne sont pas rompus aux aides publiques, c’est pourquoi nous avons voulu que ce soit le plus simple et accessible possible » confirme Alice Falk. Grâce à la plate-forme Sacem Connect, les établissements peuvent aussi trouver des artistes pour organiser leurs concerts.
FAIRE VIVRE LE LIVE PARTOUT EN FRANCE
« Notre objectif était de veiller à ce que les aides soient bien réparties dans toutes les régions de France : faire vivre le live partout en France ! » détaille Alice Falk. La sélection des dossiers est confiée aux antennes territoriales de la Sacem. Au plus près du terrain.
Parfois, l’accompagnement va même plus loin. « Je n’avais pas entendu parler de cette aide. C’est ma référente Sacem à Strasbourg, qui m’a conseillé de déposer un dossier la première année. Au total, nous avons eu recours à « Tous en live » pour trois événements en en 2022. C’est un vrai coup de pouce dans notre budget » raconte Julie Goulon coordinatrice de La Grenze, à Strasbourg. Ouvert de fin avril à fin juillet, la Grenze, en plus de la restauration, propose de multiples animations avec ses partenaires locaux. L’établissement s’attache notamment à promouvoir les jeunes artistes de la région de Strasbourg. « La relation avec les établissements est le cœur de notre travail. Je connaissais La Grenze, la richesse de leur programmation, et je savais qu’ils s’inséraient parfaitement dans le dispositif » confirme Yasmina Gabel, adjointe de la direction territoriale alsacienne de la Sacem.
Pour être éligibles à l’aide, il faut être à jour du paiement des droits d’auteur, produire des artistes en début de carrière et les rémunérer professionnellement. Chaque antenne locale examine les dossiers reçus. « Nous regardons le répertoire soutenu, si les artistes programmés sont locaux ou en tout début de carrière, et nous veillons à ce qu’il y ait une homogénéité sur le territoire afin de ne pas tout concentrer dans les grandes villes. » poursuit Yasmina Gabel.
L’objectif de « Tous en live », c’est « d’accompagner le risque d’entreprendre dans une période qui reste incertaine » explique Alice Falk. « Nous souhaiterions pouvoir le pérenniser, mais cela dépend beaucoup des revenus de la rémunération pour copie privée » poursuit-elle.
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TEMOIGNAGES :
La Grenze à Strasbourg : « Une aide pour défendre les artistes locaux »
« Bar, cantine, ateliers divers et événements montés en lien avec nos partenaires locaux… Notre terrasse culturelle : la Grenze est un tiers-lieu très ancré dans son territoire. Chaque année, de fin avril à fin juillet, nous nous attachons à faire vivre la scène locale et à donner une visibilité à des artistes débutants. 90 à 95 % des artistes que nous programmons les soirs de concerts viennent de Strasbourg ou de son agglomération. Nous avons un budget serré et nous veillons à garder des prix accessibles (de 5 à 15 euros au maximum). À cause de la crise sanitaire, nous n’avons pas pu reprendre les concerts avant 2022. « Tous en live » a représenté un vrai coup de pouce pour rémunérer correctement ces jeunes artistes et nous aider à promouvoir la scène strasbourgeoise. »
La Javelle à Paris : « Un soutien bienvenu pour les lieux un peu hybrides »
« La Javelle, c’est une guinguette un peu particulière : on y mange, on y boit et on y danse, mais on peut aussi y assister à des concerts, participer à des animations… Nous sommes au cœur de « Bercy beaucoup », un tiers-lieu solidaire du 12è arrondissement. Notre credo, c’est de créer du lien social. Les événements que nous organisons sont ouverts à tous et gratuits, nous y tenons. Nous ne cochions pas les cases pour bénéficier des aides publiques et encore aujourd’hui, les revenus du bar et de la restauration peinent à assurer la rentabilité des concerts que nous organisons. Or, nous sommes très attachés à rémunérer les artistes correctement. « Tous en live » est un soutien bienvenu dans la période, il nous permet de maintenir une offre culturelle et c’est un bon signal pour les structures comme nous qui ne rentrent pas forcément dans les cases. »
Le Garage à Angers : « Une aide pour élargir les propositions artistiques »
« Le retour des clients au bar a été plutôt rapide. On sentait une forte envie de sortir à nouveau après les restrictions. Pour la musique, c’était plus compliqué. Les gens avaient plutôt envie d’être dehors et les contraintes (masques, station assise, etc.) passaient plus difficilement. De notre côté, nous avons repris le live dès que ça a été possible. Au Garage, la musique a une place importante. Café-concert depuis 2018, nous programmons beaucoup d’artistes émergents, et nous sommes positionnés sur les répertoires indépendants : rock, pop française, jazz et électro notamment. Notre budget fait que nous sommes limités, notamment en termes de plateaux artistiques. « Tous en live » nous permet d’élargir les propositions artistiques. Plus il y a d’aides, plus on peut à notre tour aider les artistes à se produire. »
Pour aller plus loin :
La Sacem relance le dispositif Tous en Live :
pour les cafés, bars, hôtels, restaurants
pour les discothèques et clubs electro
Sacem Connect vous met en relation avec des artistes disponibles dans votre région.
Publié le 17 avril 2023