Le festival de bandas de Condom

Mai 2023

Entre les Landes et Toulouse, Condom, 8 000 habitants environ, a pris le parti de la fête. Du 12 au 14 mai, la cité gersoise commémorait les cinquante ans de son Festival européen de bandas.

©Bandas de Condom

Cet événement génuine a été imaginé dès 1964 par des habitants du quartier de la Bouquerie, sur la rive gauche de la rivière Baïse. Tous étaient des habitués des fêtes de Pampelune en Espagne. En 1973, le festival est officiellement créé, accompagnant un changement de paradigme : « Les bandas étaient jusqu’à lors considérées comme des accessoires, intervenant entre concours de pétanque et repas du soir », explique Gilles Boyer, co-président de ce festival unique en son genre.

CONDOM, DOMICILE DES BANDAS

Étendu sur trois jours, lors du deuxième week-end de mai, réunissant plus de 45 000 « festayres », festivaliers festifs, le Festival de Condom a accompagné l’essor d’un genre musical à part entière. Matière vivante nourrie par les penas, associations et amicales de musiciens amateurs « dont le niveau technique n’a cessé de croître », selon Gilles Boyer, le bassin fertile des bandas a généré des formes, des usages nouveaux. Cette effervescence a permis des créations croisées, comme le concert donné en 2023 sur la place Saint-Pierre par le groupe gascon-béarnais Nadau composé de 150 musiciens issus de plusieurs bandas, et prêts à accompagner le chant occitan de Joan de Nadau.

Son ancrage dans la tradition n’a pas empêché la musique des bandas – classée au patrimoine culturel immatériel français – d’évoluer pleinement. À l’origine, une banda (de 10 à 45 musiciens) déployait ses cuivres et ses percussions (caisse-claire, grosse-caisse, cymbales) lors des férias, courses landaises ou manifestations sportives, exécutant un répertoire de musique traditionnelle : paso-doble, passa-calle, jota, arin-arin, fandango … « Puis, le répertoire et le style se sont adaptés aux goûts de la rue, précise Gilles Boyer, en intégrant le rock, les variétés, de la salsa latino, toute sorte de musiques festives », comme l’ont fait les harmonies ailleurs en France. Mais, à la différence de ces dernières qui se produisent plus souvent en concert, les bandas sortent dans les rues, elles sont participatives. « Ce qui pour les jeunes est extrêmement motivant, selon le co-directeur du festival de Condom, également joueur de saxophone baryton. Nous avons parfois trois générations dans la même banda, et une proportion croissante de femmes ». 

« Une banda se situe au cœur de la fête et du public », explique Stéphane Garcia, qui mène la Band’A Léo, 120 musiciens, répartis en deux formations, adultes et juniors, créé en 1998 à Léognan en Gironde et dont le slogan est le suivant : « Faire plaisir en se faisant plaisir, partager la fête en musique et bien des moments de convivialité, vivre la vie à pleines dents, c’est l’ADN de la BAND’A LEO ». Stéphane Garcia, qui joue de la batterie mobile, insiste sur « l’émotion, le partage des valeurs et l’excellence musicale. ». Et la joie, celle par exemple de jouer un madison sur la place publique.

LA FÊTE ET LES JEUX

Autre point fort : le Festival de bandas de Condom a pris dès ses débuts la voie passionnante du concours décernant chaque année des titres, et parmi eux celui de Champion de France, et une Palme d’or européenne, gagnés cette année, comme en 2017 et 2018, par la Band’A Léo, qui rafle également le “Gascon d’or”, premier prix tradition, la “Trompette d’or”, premier prix musicalité, et le “Saxo d’or junior”. Vingt jurés pour la plupart musiciens jugent des fondamentaux (passa-calle, paso-doble), de la finesse d’exécution, en groupe ou en solo, des capacités à créer des ambiances, à enflammer les lieux.

Le Festival accueille désormais des formations venues d’autres pays européens, dont la Belgique, réputée pour ses nombreuses bandas qui n’intégraient naguère pas les instruments à bois, « contrairement à nous, explique Gilles Boyer, ce qui donne une coloration plus douce, plus harmonique ».  Il fallait, poursuit le président, « ouvrir les perspectives ». Pour la soirée anniversaire, Condom avait donc convié un habitué des lieux « depuis trente ans » à enflammer la place Saint-Pierre, le très populaire Patrick Sébastien. Bandas, danseurs et boîte à sardines garantis.

Le producteur de télévision a partagé la scène avec Los Soupaeros, la banda née au sein de l'École nationale supérieure de l'Aéronautique et de l'Espace de Toulouse (Supaero) dans laquelle joua un certain Thomas Pesquet. « Ceci n’est possible que si nous irriguons les territoires, et que nous associons les jeunes et les très jeunes, pour leur donner le goût de pratiquer un instrument et de créer des valeurs communes », conclue Gilles Boyer.

Publié le 01 juin 2023