À l’automne 2023, l’UNESCO, a annoncé l’inscription de Toulouse à la liste des Villes créatives des musiques, un réseau permettant des collaborations internationales. Une reconnaissance qui souligne pour la ville l’importance et la diversité des politiques en faveur de tous les genres musicaux.
« Allez, chante, chante, ville ardente, bouge, ville noire et rouge. Ville où les motivés vivent, ville où les Claude se suivent » : en octobre 2023, Francis Cabrel dédiait une chanson à Toulouse, ville que l’Agenais a beaucoup fréquentée professionnellement. Le titre ? Un morceau de Sicre, hommage à Claude Sicre, co-fondateur des Fabulous Trobadors, militant de la cause occitane. Cabrel y ajoute un clin d’œil pour Zebda et leur collectif des Motivés, une arborescence née dans le quartier des Izards.
LABELISEÉ « VILLE CRÉATIVE DES MUSIQUES »
Au même moment, Toulouse recevait le label « Ville créative des musiques », octroyé par l’Unesco afin de « promouvoir la coopération avec et entre les villes ayant identifié la créativité comme un facteur stratégique du développement urbain durable » - une seule ville française, Metz, l’avait obtenu jusqu’à lors, en 2019. Le réseau rassemble une cinquantaine de villes à travers le monde, de Praia au Cap-Vert à Montreux en Suisse, d’Essaouira au Maroc à Salvador de Bahia au Brésil ou Chennai en Inde. Si elle est purement honorifique, cette appellation est « une belle reconnaissance pour la scène musicale actuelle et sa très, très grande diversité », selon le maire de Toulouse, Jean-Luc Moudenc, fier de posséder un Conservatoire de musique depuis 1820.

UNE SCÈNE LOCALE PLEINE DE VITALITÉ
Aujourd’hui parsemée de nombreux festivals internationaux tels que Rio Loco, Piano aux Jacobins ou Toulouse les Orgues, « la ville mélomane, qui swingue, groove et frisonne », selon Marc Voinchet, directeur de France-Musique, se targue de jouir d’une triple qualité, « conivence, tchache et solidarité ». Claude Sicre confirme, soulignant de « nombreuses passerelles » construites par les acteurs locaux, « de la mairie à la Région, des producteurs aux associations », multiples et actives. Avec, transversalement, le rôle important de la Sacem « qui soutient les artistes de tous les bords et les festivals de tous les genres, comme le Rio Loco, le Pink Paradize ou le Rose Festival ».
« Les évènements phares comme le festival Rio Loco, les institutions, comme l’Orchestre national du Capitole et l’Opéra, ne se sont pas coupés de l’ombre des anciens, tel Claude Nougaro, ni de l’irrigation très profonde du terrain musical par des passionnés comme l’équipe du Bikini ou celle de la maison de production Bleu Citron », poursuit Marc Voinchet. Fondée à Toulouse en 1986 par le Tourangeau Gilles Jumaire, complice des débuts du Printemps de Bourges et aujourd’hui l’un des piliers de la transformation de la Cartoucherie, Bleu Citron continue d’accompagner Big Flo et Oli, duo de rappeurs toulousains au succès constant.
Un dynamisme local et une singularité propre qui s’inscrivent dans une longue tradition historique. Au milieu du 19è siècle, Toulouse fut considérée internationalement comme la capitale du belcanto. « Ville provinciale, qui ne possédait pas de bourgeoisie d’affaires comme Marseille, Lyon ou Bordeaux, puis qui a vécu grâce à des industries d’Etat, Toulouse a dû s’inventer, elle est devenue la capitale de l’anti-province ». Se nourrissant de l’extérieur, elle irrigue en retour l’Hexagone de sa diversité, analyse Claude Sicre, désormais directeur artistique du festival Peuples et musiques du Monde. Selon lui, « on a su ici respecter la musique populaire, qui vient du sauvage, du désordonné, des ruptures de l’histoire ». Et bâtir un paysage musical d’une extrême richesse, auquel le label de l’UNESCO va sans doute donner un nouveau coup de pouce. « C'est une urbaine musique qui vient du fond de l'histoire/Tu mets un morceau de sicre dans ton café noir », chante Cabrel le troubadour.
Publié le 19 janvier 2024