L’établissement de la rue des Lombards à Paris fête cette année ses 40 ans. 40 ans de promotion du jazz sous toutes ses formes, de bœufs endiablés jusqu’au petit matin. L’occasion de revenir sur l’histoire de ce célèbre club, la programmation des festivités et ses projets pour l’avenir.
Nul besoin d’être un fan de jazz pour connaître le Sunset. Le nom du petit établissement et celui de la rue des Lombards, dans laquelle il est installé depuis désormais 40 ans, résonnent comme ceux de ces lieux mythiques pour la musique.
« 40 ans de légendes »
L’histoire commence en 1982. « Des musiciens qui fréquentaient ce qui était alors un restaurant avec un bar américain un peu showbiz au sous-sol ont convaincu mes parents de transformer le bar en club de jazz. » raconte Stéphane Portet, patron et programmateur de la salle.
Les musiciens en question s’appelaient Francis et Didier Lockwood, Christian Vander ou encore Paco Sery, des grands noms déjà. Michèle et Jean-Marc Portet aménagent donc la salle voûtée à l’acoustique idéale pour en faire un club de jazz.
C’est la naissance du premier vrai club de la rue des Lombards, « et puis en 1984, le Baiser Salé puis le Duc des Lombards ont ouvert leurs portes » poursuit le patron du Sunset. Impossible d’évoquer les 40 ans du Sunset sans revenir sur l’histoire rue des lombards. Immortalisée dans un épisode de la série les Simpson’s, elle représente la « vitrine du jazz et du jazz français dans le monde. Comme l’était la 59è rue à New-York dans les années 50 » estime Stéphane Portet.
L’histoire de la rue des Lombards, c’est une part de l’histoire du jazz en France. Cette concentration de clubs fait la force de cette petite rue du quartier des Halles, rapidement devenue le point de rendez-vous des jazzmen du monde entier de passage à Paris. Brad Melhdau, Michel Petrucciani, Miles Davis… Difficile de compter les grands noms passés au Sunset.
C’est cette logique de quartier qui a poussé Stéphane Portet à organiser le point d’orgue de la célébration des 40 ans du Sunset au théâtre du Châtelet, à quelques encablures du Sunset et y faire jouer les légendes s’y sont produites. « C’est une salle magnifique, avec une acoustique extraordinaire » s’enthousiasme-t-il. 3h30 durant, le 28 janvier, de grands noms du jazz tels que Rhoda Scott et ses lady all stars, David El Malek, Étienne Mbappé ou encore Sylvain Luc et Stéphane Belmondo se succéderont sur la scène du grand théâtre parisien pour fêter cet anniversaire.
40 ans de passion
Au-delà de la visibilité de cette rue du jazz à Paris, « ça crée une vraie dynamique, une émulation entre nous tous. C’est grâce à cela que nous avons créé l’association Paris Jazz Club qui défend le modèle des clubs de jazz », détaille le patron du club.
Petite jauge – 80 personnes au Sunset, autant au Sunside, la jumelle du rez-de-chaussée – proximité avec le public, acoustique travaillée… Les clubs de jazz ont un modèle particulier : « un réseau unique sans équivalent dans les autres styles musicaux » que le dirigeant entend défendre. « Nous sommes un laboratoire pour les musiciens, ils viennent tester de nouvelles musiques, recruter des musiciens… Ils ont un retour direct du public, ils adorent ça. » poursuit-il.
En dehors du confinement, le Sunset n’avait jamais vraiment fermé ses portes. Ouvert 7 jours sur 7, il organise 750 concerts par an. « Nous avons eu très peur de la crise » reconnaît Stéphane Portet. « Nous sommes producteurs, 99 % de nos spectacles, nous touchons très peu de subventions, en dehors du soutien de la Sacem. Le CNM nous a aidé à nous maintenir à flots. C’est important de soutenir des structures comme les nôtres. » poursuit-il.
Porté par un « métier de passionné », il s’estime « missionné » pour le jazz.
En 2001, il crée les « Trophées du Sunside », destinés aux jeunes musiciens de jazz. Le patron est fier d’afficher une programmation « à 80% made in France », estimant qu’ « on n’a pas à rougir de la qualité des jazzmen français. »
Le Sunset, comme la plupart des clubs de jazz est très engagé pour l’émergence des nouveaux talents. Une passion que l’on retrouve dans la programmation – très éclectique – du club, « le jazz est par essence une musique plurielle, qui a toujours flirté avec les autres styles, ça serait dommage de se cantonner à un carcan » analyse Stéphane Portet.
Avec les sessions « Jazz et goûter », organisées le dimanche après-midi autour d’une thématique grand public et destinés aux enfants et à leurs parents, il prépare aussi les spectateurs de demain. « C’est vrai qu’on les prend très jeunes, s’amuse-t-il, mais l’idée est de tout faire pour donner envie aux jeunes d’écouter du jazz ». Alors que faut-il souhaiter au Sunset ? La réponse de son patron est sans ambiguïté : « d’aller jusqu’à 50 ans ».
Philippine Donnelly
Publié le 20 janvier 2022