Le musicien nordiste Tim Placenti porte l'éclectisme en bandoulière

Le public nordiste l’avait remarqué au Main Square Festival en 2015 et 2019 ou en première partie de Marianne Faithfull en 2014. Leader flamboyant, arrangeur, producteur, compositeur pour le théâtre… Tim Placenti s’est fait une place à part. Avec Cœur Kaiju, son nouveau trio indie pop, il aborde le thème de la santé mentale sur des ondes positives.

« Au départ, je voulais faire carrière dans le cinéma, mes études m’ont amené jusqu’au master. » À en juger par sa détermination et son aisance scénique, on aurait pourtant juré que, petit, Tim Placenti se serait vu en guitar hero maître des stades. Lorsqu’il décrit son « rapport viscéral à la musique » dans un charmant franglais à travers sa passion pour les Smashing Pumpkins ou sa pédale d’effet Whammy, ce trentenaire vibre comme une douze cordes, un autre de ses instruments fétiches.

Depuis les années fac, les projets musicaux à géométrie variable dont ce Tourquennois a réalisé tous les disques (quatre albums et autant d’EP) s’enchaînent comme autant de rôles de composition : Averse (metal / folk progressif) ; Esplanades, duo de rock alternatif ; TFP, son projet solo folk en hivernation. Et aujourd’hui, le trio indie pop Cœur Kaïju. Tout cela serait-il arrivé si son père, un ex-musicien semi-pro, ne lui avait offert pour ses 14 ans sa première guitare électrique chinée en braderie ? On ne refera pas le film. Disons plutôt que quelque chose a été scellé à l’adolescence : « je suis passé directement des Hanson et Spice Girls à Marilyn Manson ou Korn ». En 1998, il tombe sur le clip d’Ava Adore, single des Smashings Pumpkins. Un choc esthétique. « Ce qui m’avait saisi ? L’éclectisme. Cette capacité à alterner rock alternatif et ballade intimiste, en passant par des univers symphoniques complexes. Le tout avec des paroles poétiques mais crues », détaille-t-il.

Le trio Cœur Kaiju avec au centre, Tim Fromont (chant, guitare, clavier), à droite Jérémy Cuvelier (chant, basse), à gauche Thomas Berthelot (batterie). ©Marianne Helll

POP FRONTALE ET SANTÉ MENTALE

Cette alliance des contraires fait aussi battre très fort Cœur Kaiju. Le trio met actuellement la dernière main à un premier EP en français à paraître à l’automne, avant un suivant en anglais. Il y cultive la tension entre pop frontale, de Tears for Fears à Phœnix, et incantations surréalistes. Des « vibes » (faussement) naïves qui l’aident à « gérer les symptômes d’une longue dépression ». « J’aime la mélancolie véhiculée par cette pop là, avec une énergie galvanisante sur scène, explique-t-il. Je suis à la recherche de cette communion, de ces stimuli et ne veux pas répéter la même chose dans la musique et les paroles de Cœur Kaiju. » Et de citer en exemple la « maîtresse à penser » Kate Bush : « il y a chez elle de la chaleur et de la froideur, de la grandiloquence et de l’intimité, de la folie au sens du lâcher prise ».

Cet apprentissage de l’abandon de soi, Tim aime le partager. Investi dans l’action culturelle, il collabore avec l’Aéronef et Le Grand Mix pour intervenir auprès de publics en situation de handicap et en Ephad. Sans compter les scolaires. En 2020, il anime sa première Fabrique à chanson avec le titre collaboratif Eteindre les couvre-feux. « Ces mises en situation sont hyper épanouissantes : on se sent à sa place et pendant un temps, on échappe à la culture ambiante de la production de ‘‘contenus’’ ». Une révélation pour Tim Placenti que la Sacem est fière de soutenir.

Publié le 13 mars 2024